«Je n'aime pas la peinture raisonnable», déclarait Delacroix.
Quelle épigraphe plus juste pour cet autre imaginatif, Barbey
d'Aurevilly ? Les deux artistes aiment le tumulte tragique, les
orages, la fougue, les ébauches d'images, le faste, l'intensité,
tout ce que Baudelaire appelait «les phénomènes ardents de la
vie». Peintres hardis de la volupté et de l'enfer, ils décèlent sous
l'éblouissement des apparences le tourment intérieur, le travail
obstiné de la fatalité, le «surnaturalisme».
Par l'éclat des images, la fulguration des scènes, l'énergie des
personnages, les récits de Barbey d'Aurevilly électrisent, fouettent
le sang, redressent ceux qui se voûtent. D'Une vieille maîtresse
aux Diaboliques règnent l'exceptionnel, le rare, l'imprévisible.
Tout ce qui n'est pas en rapport avec les tourments et les orages
des âmes est étranger à ces romans. L'auteur n'ose-t-il pas révéler
une Amazonie que la plupart des écrivains de son temps refusent
encore d'explorer : la puissance du désir érotique, les déguisements
et les perversions dont il est capable ? Pour avoir résisté avec
courage aux prétendues évidences des «bien-pensants» de son
époque, cet artiste solitaire nous apparaît aujourd'hui comme
notre contemporain. L'admiration d'un Baudelaire ou d'un Proust
pour l'un des romanciers les plus fascinants du XIXe siècle est
maintenant largement partagée.
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