À quelles conditions l’histoire peut-elle se présenter comme science ? Cette question critique n’a cessé de préoccuper les penseurs allemands du début du siècle, de Dilthey à Weber, et elle est au centre des travaux philosophiques de R. Aron. Moins connus en France sont les débats qui ont eu lieu sur ce point en langue anglaise de Collingwood à W. Dray, et de Hempel à Popper. C’est d’ailleurs autour d’une discussion des thèses de ce dernier que s’organise essentiellement le présent ouvrage, qui pourrait être considéré comme une introduction à la théorie poppérienne de sciences sociales. Les problèmes épistémologiques de l’histoire sont en effet inséparables d’une conception générale des sciences sociales. L’analyse des conditions de l’explication historique conduit naturellement à une réflexion sur la question des « lois » présentes en histoire, sur celle de l’individualisme méthodologique et sur celle de la rationalité des agents. Renoncer à toute « philosophie de l’histoire » moniste et déterministe ne doit pas conduire à refuser toute intelligibilité aux processus socio-historiques. De même, critiquer le positivisme au nom de la spécificité du comportement humain (« compréhensible ») ne conduit pas nécessairement à renoncer à tout idéal de l’unité (méthodologique) des sciences. Plus généralement, il s’agit de dépasser l’opposition stérile de ces deux erreurs symétriques, le scientisme et l’irrationalisme.
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