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Dans le duel séculaire Angleterre-France, il fallait bien un jour confronter Sherlock Holmes et la fantasmatique souris d’hôtel qui choisit, pour la circonstance, le visage de Musidora, l’inoubliable interprète du feuilleton cinématographique "Les Vampires". Nous avons d’un côté le grand détective victorien à la mine sévère, de l’autre une séduisante cambrioleuse, véritable type de Parisienne friponne, effrontée, délicieusement indécente. Pendant que l’un arpente d’un pas décidé les ruelles d’un Londres chapeauté de brouillard, l’autre, serrée dans un collant noir où seuls affleurent des yeux charbonneux débordant de vaines promesses, trotte menu sur les toits glissants de Paname, d’une cheminée à l’autre, éclairée d’un rayon de lune, jusqu’au Palace où sommeille la proie convoitée. Sous l’égide de Gérard Dôle, Sherlock Holmes et Musidora incognito, tantôt fille, tantôt garçon, vont s’approcher, s’apprécier, et résoudre ensemble de bien singulières énigmes, étranges et fantastiques.
Une image du roi des détectives et de son curieux élève Harry Taxon nous renvoyant avec un zeste d’humour à la saga allemande des Welt-Detektiv, ces « Dossiers secrets » apocryphes des années 1900 qui furent à l’origine de la série Harry Dickson.
EXTRAIT
Saviez-vous, mon cher, me confia Musidora, un soir que nous sortions de l’Ambigu où se donnaient Les Triomphes de Sherlock Holmes, que je l’ai connu? Je veux parler, bien sûr, de l’être de chair et de sang, de l’homme qui a réellement existé et vécu à Londres jadis. Car je me moque bien du limier de fantaisie que William Gillette 1 rendit célèbre en le campant au théâtre avec brio. Saviez-vous aussi que chez M. Sherlock Holmes, le vrai, qui n’a jamais connu de docteur Watson, se succédèrent plusieurs grooms ou chasseurs dont certains sont devenus ses élèves ? Le premier en date fut un cockney couvert de taches de rousseur qui se prénommait Billy. C’est ce petit frispoulet de Charles qui le remplaça, un loustic pas plus haut que trois pommes qui ne quitta Baker Street que pour grimper sur les planches et se tailler ensuite la part du lion au cinématographe sous le nom de Charlot. On m’a parlé aussi d’un jeune freluquet que je n’ai pas connu, qui resta longtemps au service du détective, et qui, lui, n’hésita pas à prendre le pseudonyme de Harry Dickson vers la fin des années vingt quand, à son tour, il embrassa la profession. En ce qui me concerne, j’ai modestement assuré l’intérim entre Billy et Charlie pendant toute une saison. Je crois me souvenir que c’était en 1900.
A PROPOS DE L’AUTEUR
Gérard Dôle est à la fois journaliste, historien, musicien, chanteur, auteur-compositeur et, bien entendu, écrivain. En 1967, il s’essaie à la chanson à texte dans des cabarets de la Rive gauche tels que L’École Buissonnière de René-Louis Laforgue, L’Écluse ou L’Échelle de Jacob. Il passe même à Bobino en 1968, en première partie du récital de Catherine Sauvage et de Guy Béart. Retenons une série de disques qui font de lui un spécialiste de la musique acadienne de Louisiane et un grand amoureux des orgues de Barbarie, mêlant parfois musique et littérature populaire comme dans La Chanson de Nestor Burma (1982) en collaboration avec Tardi et Léo Malet, et La Complainte de Harry Dickson (1984). Gérard Dôle est aussi l’auteur d’une étude savante sur L’Histoire musicale des Acadiens (L’Harmattan, Paris, 1995), et de nombreuses nouvelles fantastiques publiées tant en France qu’aux États-Unis.