À l'hospice, Huguette, le cerveau détruit par la maladie d'Alzheimer, ne parle plus. Ses cousines, sa belle-soeur, sa voisine, une visiteuse
catholique dressent son portrait, chacune à sa façon, chacune à son tour. Derrière les vertus proclamées de ces existences honorables,
le ridicule, l'égoïsme, la méchanceté. Il y a aussi les employés de l'hospice, dont le métier est de prendre soin des vieux, et Laure, la fille du
mari d'Huguette, épousé trop tard, mort depuis longtemps. De peur que j'oublie, qui tient tout à la fois de l'enquête policière, du monologue
de théâtre, du journal intime, du tombeau littéraire, est une sorte de roman noir construit autour d'un personnage au destin commun qui
s'accroche à la vie avec une férocité indomptable. Marie-Noël Rio, née en 1944, est d'abord monteuse de cinéma, puis dramaturge et metteur
en scène. Elle est l'auteur de trois autres romans, Pour Lili, Le Palmier en zinc et Paysages sous la pluie, parus aux Éditions du Sonneur.
Non, elle n'a pas de visites. À part la vieille bigote qui apporte la communion aux pensionnaires le dimanche, et de temps en temps
une femme qui vient de Paris, sa belle-fille je crois. Autrement personne ne vient la voir. Nous, on n'a pas le temps. Nous, c'est bonjour bonsoir
comment ça va aujourd'hui Madame Bonin, c'est tout, on est débordées. On les lave, on leur met les couches, on les change, on les fait manger,
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