Le Journal des Goncourt, dans la période 1861-1864, témoigne de
l'activité débordante des deux frères, de leurs projets, des relations qu'ils
entretiennent avec les éditeurs, avec la critique, il donne des
informations essentielles sur les «chantiers» flaubertiens. L'année 1862
figure une charnière. Les deux frères rencontrent pour la première fois
Sainte-Beuve, participent avec lui à la fondation des dîners Magny.
Parallèlement, ils sont introduits dans le salon de la princesse Mathilde.
Cette reconnaissance littéraire et mondaine est le résultat d'une patiente
stratégie que le Journal permet d'analyser car il est un excellent
sismographe du champ littéraire. Mais il se fait aussi l'écho d'une
mélancolie qui est toujours d'opposition. Voyant la vie en gris, les
Goncourt éprouvent de la sympathie pour les êtres victimés, qu'il s'agisse
de leur servante Rosalie Malingre ou des femmes condamnées au silence
par le système carcéral. On pourrait donc lire ce troisième volume sous
le signe d'une poétique des contrastes, contrastes des milieux auxquels
les deux frères se trouvent confrontés, contrastes entre l'intime et la
description des sociabilités, entre le désir de saisir sur le vif les
conversations et la création d'une prose d'art. Mais on voit aussi se
déployer des métaphores structurantes. Le caricatural et le spectral se
rejoignent souvent, la fantasmagorie et a l'allégorie s'imposent dès qu'il
s'agit de rendre compte du Second Empire et de la «vie parisienne». Ces
tiraillements, ces tensions, ces conjonctions, dans les années 1861-1864,
font la richesse d'un Journal dont cette édition critique, richement
annotée, a voulu analyser les composantes.
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