Pourquoi nous arrive-t-il d'être si malheureux ? Peut-on
espérer guérir par nous-mêmes du chagrin ? Peut-on l'éviter, le
supprimer, réussir à en consoler les autres ? Ou doit-on s'y résigner,
comme à une fatalité ?
Ces questions, que chaque épreuve douloureuse ravive,
interrogent le pouvoir qu'à l'homme sur son propre destin.
La violence et l'intensité d'un trouble sentimental, le visage
effroyable de la mort d'un ami, le sentiment d'injustice qu'elle
nous inspire, le désarroi dans lequel elle nous plonge, tout paraît
justifier nos plaintes et légitimer nos pleurs.
Au pessimisme tragique de l'existence, Cicéron oppose
le pouvoir thérapeutique de la méditation philosophique. Ce
pouvoir incertain de soigner les âmes chagrines, les stoïciens
y prétendent en indiquant à l'homme sa responsabilité fondamentale
vis-à-vis de ses propres états affectifs ; à l'origine d'un
chagrin, même dévastateur, juste une simple opinion, un bref
jugement qui confère l'existence à un mal qui n'est qu'une
simple représentation et que rien ne nous oblige à croire.
Sages, les hommes pourraient l'être pourvu qu'ils comprennent
qu'ils sont à la fois auteurs et victimes de leur propre
souffrance, et que la nature leur a déjà donné la capacité d'être
heureux en toutes circonstances, s'ils ne consentaient qu'à faire
bon usage de leur raison.
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